AVIS LECTURE:      L'Anomalie, Hervé Le Tellier

20/02/2021

Résumé: "Il est une chose admirable qui surpasse toujours la connaissance, l'intelligence, et même le génie, c'est l'incompréhension." En juin 2021, un évènement insensé bouleverse les vies de centaines d'hommes et de femmes, tous passagers d'un vol Paris-New York. Parmi eux: Blake, père de famille respectable et néanmoins tueur à gages; Slimboy, pop star nigériane, las de vivre dans le mensonge; Joanna, redoutable avocate rattrapée par ses failles; ou encore Victor Miesel, écrivain confidentiel soudain devenu culte. Tous croyaient avoir une vie secrète. Nul n'imaginait à quel point c'était vrai.

C'était LE livre de 2020, le Goncourt d'une année où la culture fût malmenée et oubliée. L'Anomalie, récit dont vous avez forcément entendu parler, est l'histoire simple d'hommes et de femmes, qui comme vous et moi, vivent, ou bien meurent. Un roman devenu célèbre grâce à son fameux bandeau rouge, mais qui cache néanmoins une histoire :

voici mon avis sur L'Anomalie, d'Hervé Le Tellier.

Un roman bourré de style

          Il est indéniable que si le roman se démarque d'autres de même catégorie, c'est grâce au style et à la plume d'Hervé Le Tellier : précise et poétique. Les métaphores (et autres procédés dont on site le nom sans réellement prêter attention à ce qu'ils signifient réellement) s'enchaînent au fil du récit, sans pour autant encombrer le texte de passages barbants. L'histoire se déroule, les phrases "passent toutes seules", et l'auteur arrive, sans aucun effort pour le lecteur, à le mener exactement où il veut: c'est un vrai voyage, bourré d'émotions, que propose ce livre. Le vol en avion, élément déclencheur du roman, devient sur certains passages anecdotiques; et même s'il semblerait, à la lecture du résumé, que ce soit le centre du récit, il n'est que le milieu du livre, entouré de l'avant et de l'après de la vie des passagers. Ne vous attendez donc pas à lire le descriptif d'un vol en avion; ce n'est même pas le sujet d'une seule partie.  


Un fil rouge (malheureusement) pas à la hauteur des personnages

         Le récit en lui même ne présente, dans le fond, que des personnages d'une grande simplicité, qui pourraient très bien être votre voisin ou votre boulangère. Leurs vies, ou ce qu'il en reste, ne sont pas celles de super héros ni d'exclus de la société; mais c'est un livre sur les gens d'un monde plus réel encore que le nôtre. Bien que l'auteur se délecte de les entraîner dans des situations totalement absurdes à mon goût, et en lesquelles je n'ai pas cru une seule seconde, force est de reconnaître que le plus intéressant dans cette histoire loufoque est l'originalité des personnages, dont on veut connaître la fin (et c'est peut-être là la seule motivation qui m'a poussée à finir ce roman). En un mot: des personnages réels dans une situation au scénario incrédule et catastrophique.


Une action lente et déséquilibrée

          De plus, l'action est un peu... molle ! Alors qu'une première partie dresse le portrait de tous les personnages que l'on va rencontrer (et dont, énorme point négatif pour ma mémoire sélective, on oublie le prénom du premier une fois que l'on a lu celui du troisième), la seconde partie est trop technique, et m'a perdu. Fort heureusement, les dénouement et la fin sont les meilleurs moments du roman, avec une dernière partie qui ne manque pas de sympathie, et une fin de récit géniale et extrêmement bien pensée. 


Un jour une idée

     Mais ce roman, vanté sur tous les toits des plus hautes émissions culturelles (dont les présentateurs aiment parfois asséner un léger rire hautain à tous ceux qu'ils qualifient d'acculturés) cache une ombre au tableau: les dates... Quelle difficulté ! Est-ce une volonté de l'auteur, un quelconque effet de style, qui le pousse à perdre ses lecteurs dans le temps, pour en montrer toute l'ironie ? Car attention, avant de commencer l'Anomalie, soyez prêt à vous donner entier à ce roman, qui demande quelques efforts de concentration pour retenir les dates qui s'accumulent au fil des chapitres, parfois en étant précisées au jour près. C'est assurément trop, pour une bonne lecture.


          En conclusion, non, ce livre ne m'a pas réellement convaincu, mais non, ce n'était pas une souffrance que de lire cet ouvrage, tout de même d'une grande acuité et écrit d'une plume agréable. Il n'y a en ces quelques 327 pages rien de mémorable (et je ne pense pas me souvenir toute ma vie de ce roman), à part peut-être le personnage de Victor Miesel, un peu plus profond que les autres, et plus touchant, et pour lequel j'ai eu, c'est vrai, de l'empathie. Je ne suis néanmoins pas déçu de l'avoir lu, car il rend service selon moi à la culture, en montrant bien qu'elle est très accessible à tous. 

Un chef d'œuvre, peut-être pas; un Goncourt, peut-être bien...

Lu et approuvé. JDW




 

© 2020 Les Indiscrets. Tous droits réservés.
Optimisé par Webnode
Créez votre site web gratuitement ! Ce site internet a été réalisé avec Webnode. Créez le votre gratuitement aujourd'hui ! Commencer